LE "VICTOR HUGO" A LORIENT : UN CERTAIN GOÛT DE LA DIFFERENCE

Cuisiner, c'est donner. Margarita et Dominique DUBLE, dans leur restaurant lorientais "Le Victor Hugo", en sont la preuve vivante et belle. Cuisiner, c'est accueillir l'affamé pour rassurer sa faim et lui donner le goût de la différence, dans l'assiette d'abord. Cette table à Lorient y parvient parfaitement, humblement.

Il existe des panonceaux, à l'entrée des restaurants, faits pour appâter le chaland. Souvent en vain. Guides culinaires savants et autres bibles réputées gourmandes participent bien souvent à cet enfumage d'un autre temps. D'autres panneaux, en revanche, peuvent rassurer un peu.

Il en existe un, plus rare, qui trompe rarement : Il est bleu, avec au milieu un vache, blanche. On peut y lire, au dessus: "Beurre d'accueil" et dessous "AMANN MAD. (Le bon beurre)" et dessous encore: "lebonbeurre.com".

Un panonceau qui rappelle cette Sainte Règle en trois points qu'on apprenait, jadis, aux élèves des écoles hôtelières sérieuses. "Primo: vous souriez au client quand il rentre. Secondo: vous l'asseyez, où il préfère si possible. Tertio: en même temps que la carte, vous lui apportez une carafe d'eau fraîche et du pain. Dans le métier, ça veut dire "Bienvenue". Si vous ne ressentez pas l'envie de dire ça au client, changez de métier. Tout le reste, ça s'apprend !".

Vient la carte, donc, au "Victor Hugo", après la fameuse carafe et le beurre dans un ramequin, pas sous alu, escorté de son pain. Pain très bon. Rien à redire pour la carte. Intitulés clairs. Pas de verbiage, d'ampoulage lexical qui trahit trop souvent l'ego du pianiste. Et surtout, surtout, en fin de carte, on trouve la liste des fournisseurs locaux, avec nom et adresse. Ce qui prouve, au moins, que le Monsieur ne va pas "faire ses courses" à Kerpont.

Le menu du marché est à 15€00 pour deux plats, à 18€50 pour trois. Celui pour les enfants est à 11, avec un vrai jus de pomme. La formule "Terroir" est à 29€50 et celle "Coup de coeur" à 37 €. La moins chère est déjà très bien. Les vins ? Là n'est pas l’assommoir financier, cette pauvre martingale à laquelle s'adonnent trop de restaurateurs aux abois. Ce jour-là, un agaçant bourgogne Chitry (De Monsieur Giraudon, soyons précis !) fit parfaitement l'affaire pour 22€00. "Agaçant" parce qu'il nous parut un peu vert à l'ouverture mais idéal en fin de bouteille. Comme par hasard !

Mais là n'est pas la question, en fait. Pour comprendre cette table à Lorient, il faut y aller. Il faut écouter la voix douce, souriante de Margarita. Comme une barbe à papa filée au sucre d'amour qui vous pète au visage. Il faut regarder Dominique, le chef, vous parler de ses plats avec ce doute dans le regard et cette modestie un peu timide qui sied aux grands. On dirait le clown triste et drôle d’Henry Miller, dévoré par le doute et la gentillesse, souriant quand même en bas de son échelle. Prêt à tout pour faire sourire deux enfants avec des mots gentils, des yeux qui disent merci. Cuisiner, c'est donner. Et donner, c'est la vie. C'est leur vie, en tout cas.

 

Restaurant "Le Victor Hugo" – 36 rue Lazare Carnot – 56100 Lorient

Tel: 02.97.64.26.54

www.restaurantlevictorhugo.com

Fermé le Dimanche soir, le Lundi et le mardi midi

Photo : Gaël Mathieu