La villa Margaret sous la loupe de l'expert

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Les trois villas de Kernével(Kerlilon, Kérozen, Margaret) construites durant la seconde moitié du 19e siècle, portent collectivement le nom de "Château des Sardines". La villa Margaret est sans doute la plus connue d’entre elles, peut-être aussi la plus belle.

La légende veut que, enrichi par l´activité sardinière, Auguste Ouizille ait construit dans les années 1850, à chacune de ses trois filles, une villa.  En réalité Auguste Ouizille n'en construisit qu'une seule, la villa Kérozen, qui abritait à l'origine une presse à sardine détruite à la fin du 19e siècle. Sa fille Rosalie en héritera en 1899. Les villas Margaret et Kerlilon auraient été construites par les fils d’Auguste.

L´emprise de la famille Ouizille sur Le Kernevel se termine avec la Seconde Guerre mondiale, lorsque les Allemands réquisitionnent ces trois villas et transforment cette pointe de Larmor-Plage en un camp retranché d´où l´amiral Donitz, grand commandant des U-Bootes, dirige la guerre sous-marine du Troisième Reich depuis son quartier général établi dans des bunkers camouflés au pied des trois  villas. L´amiral et son état-major logeaient  dans la villa centrale de Kerlilon, située entre les villas Margaret et Kerozen. Il existait une quatrième grande villa située plus en arrière. Très endommagée durant la guerre, la villa  Sevene, qui a été détruite

En mai 1945,  les villas sont réquisitionnées par la Marine Nationale. Kerlilon devient la résidence du commandement d´arrondissement, les villas Kerozen et Margaret servant aux transmissions et aux logements.

La villa Margaret retrouve ses propriétaires en 1956. (La même année, la Marine achète les villas Kerlilon et Kerozen à leurs propriétaires. En 1983, Kerlilon devient la résidence du Commandement de la Marine.)

La villa est vendue en 1959 à la Caisse d´Allocations Familiales du Morbihan et sert de centre pour colonie de vacances jusqu´en 1987.

Cette belle villa de style néo-Louis XIII, comme on en voit sur la côte Nord, à Saint-Malo ou à Dinard, se compose d'un corps central de base carrée, de deux étages, le dernier sous combles à la Mansart (du nom de l'architecte français précurseur de l'architecture classique),et de deux tours accolées flanquées de fines et hautes cheminées.

Les toitures sont en ardoises de schiste, à pureaux entiers, (en écailles sur les brisis des combles du plan carré surmonté d'un terrasson zinc à tasseaux). Les façades ouvragées sont rythmées par des bandeaux saillants moulurés marquant les étages, et  les encadrements des fenêtres et meneaux  en pierres de taille. Les tours ornées de corniches avec modillons. Les murs crépis rehaussés de panneaux de couleur rouge font le charme de la demeure. La vue sur la mer se fait par de larges baies et des mansardes en toiture avec balustrades. La tour Nord est tournée vers le port, avec un rez-de-chaussée plus avancé et une terrasse accessible du premier étage, de larges baies vitrées et une lucarne à gâble.

En 1988, le SIVOM (Syndicat intercommunal à vocation multiple) de Cap Lorient la rachète et y installe la capitainerie du port de plaisance. Aujourd'hui, le rez-de-chaussée accueille le bar, "le Margaret", style pub Anglais, où l'on apprécie dans la chaleur des boiseries, une bonne bière ou un café en regardant la Rade. Et si le Maître des lieux me le permettait, j'aurais grand plaisir à visiter les étages et en particulier les combles où les charpentes doivent être superbes.

Yvon Hivert

A propos de l'auteur

Expert en bâtiment, Yvon Hivert dirige un cabinet lorientais d'expertises en constructions industrielles ou privées. Il décortique régulièrement, dans le magazine Le Radier les bâtiments de la Rade pour en donner les secrets, les fondements et autres recettes architecturales